D'après la rubrique Leurs villas, échos du Diable Boiteux dans Gil Blas, n°5328, 20 juin 1894

La Belle Otero au Vésinet

Le Chat-Brillant [1]. — Oh ! oui, brillant ! et combien ! ce chat qui se dresse au sommet de la porte en fer forgé de la grille entourant la villa que la señorita andalouse [2] vient de se faire construire au Vésinet, dans la plus verdoyante partie du parc !
Il semble, le doux animal félin, qu'on lui ait mis sur la poitrine toute la vitrine de joaillier que sa maîtresse se piquait sur l'estomac, histoire de faire voir trente-six chandelles au public qui l'applaudissait. Mais, cependant, comme il symbolise bien l'entrée de cette délicieuse demeure, toute capitonnée de bourre de soie rose, depuis l'antichambre jusqu'à l'escalier de service !
Terrasse de marbre. Sur le palier, paillassons de crins noirs, frisottés et serrés pour permettre aux invités de s'essuyer les pieds avant d'entrer. Vaste salle à manger ; salon andalou ; six chambres à coucher, toutes munies de guitares amoureuses. Détail : chaque bouton de sonnette électrique est composé d'un rubis cabochon entouré de diamants.
Ce que c'est que la fortune !

Caroline Otero, 1894

... toute la vitrine de joaillier

que sa maîtresse se piquait sur l'estomac,

histoire de faire voir trente-six chandelles

au public qui l'applaudissait !

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    Notes et sources :

    [1] Le Chat Brillant . Au Vésinet ce nom ne peut pas manquer d'évoquer la comtesse de Chabrillan, autrement dit Céleste Vénard, alias Mogador, femme de lettre et ancienne artiste de Music-hall qui avait épousé Lionel comte de Chabrillan. Elle avait alors quitté le Vésinet. Le nom de la villa serait une allusion au Comte de Chabrillan (neveu de Lionel) alors amant de la Belle Otero. Une autre villa, à Trouville, avait le même nom pour le même motif. Otero y passait volontiers les plus fortes chaleurs de l'été lorsqu'elle n'était pas en tournée au loin.

    [2] Caroline Otero est toujours présentée comme originaire d'Andalousie, peut-être plus évocatrice pour son public que sa Galice natale.

    [3] En 1901, Caroline Otero et Sarah Bernhardt vinrent visiter La Fauvette une "petite villa charmante", au 8 de l'allée de la Marguerite, alors à vendre. Un argument de vente pour la Gazette du Vésinet.


Société d'Histoire du Vésinet, 2014 - www.histoire-vesinet.org