Bulletin municipal n°27, 1974

Le Vésinet, Eaux - Climat - Sols

Tel est le titre d'une plaquette de treize pages, publiée en 1885 à compte d'auteur par le Docteur Maison[§], qui demeurait au 9, de la rue de l'Eglise, devenue plus tard rue du Maréchal-Foch. Après un exposé général sur les raisons de préférer Le Vésinet à tout autre lieu de villégiature, l'auteur procède, dans l'ordre, à une analyse sommaire des caractéristiques du sol et de l'air du Vésinet et ensuite à une étude biochimique des eaux.

Les bienfaits de la villégiature au Vésinet en 1885
La pollution urbaine ne date pas d'aujourd'hui. "L'air confiné, l'oxygène absorbé par les respirations humaines, les combustions dans les usines, l'éclairage etc., ont engendré dans les grandes villes une maladie d'une extension toute moderne, la phtisie pulmonaire", (n'oublions pas que c'est le médecin qui parle). Le séjour à la campagne est dès lors bienfaisant. On peut, certes, se rendre au bord de la mer ou dans les stations des Alpes ou des Pyrénées. Mais les bains de mer sont nuisibles à bien des enfants, qui deviennent "irascibles, nerveux, insupportables". Et puis, la mer, la montagne sont éloignées de Paris et "s'adressent plutôt (en dehors des personnes gravement malades) à une clientèle élégante, qui recherche plutôt les distractions multipliées que la vie paisible, hygiénique et modeste qui engendre la santé". Et le Docteur Maison ajoute "la question toilette en éloignera aussi bien des familles...".
Donc "mieux vaut le séjour à la campagne". Au Vésinet, par exemple, dont l'auteur décrit l'aspect général verdoyant et boisé ainsi que les coteaux environnants. Pour encourager le candidat vésigondin, on le fait de curieuse manière ; "II y a loin de là aux squares parisiens, marécageux comme les Tuileries; les enfants y sont libres et non encaqués comme des harengs dans un tonneau. Le pays contenant peu d'ouvriers, les enfants y sont généralement bien tenus, et on n'y voit pas la contagion des teignes et des dartres s'effectuer comme cela est arrivé souvent dans les minuscules squares susdits".

Le sol du Vésinet
II possède toutes les vertus, "les fièvres paludéennes y ont toujours été inconnues". Mais "les jardiniers seuls trouvent à redire à la sécheresse de la terre qui les force à un surcroît d'arrosage"; tandis que s'en félicitent "enfants délicats, rhumatisants, poitrinaires et tousseurs de toute espèce, qui viennent spontanément au Vésinet, ou sont envoyés par les médecins parisiens qui connaissent depuis longtemps cette station". C'était incontestablement de nature à attirer les acquéreurs en puissance des villas vésigondines!

L'air
II est parfaitement sain: "Pas de casernes; se trouvent donc retranchées les craintes d'épidémies dont ces vastes habitations ont souvent été le point de départ. Pas d'usines, donc un air délivré de tous les produits gazeux que déversent dans presque tous les environs de Paris les hautes cheminées qui passent devant l'œil fatigué du voyageur, ornées de leur sombre panache". Les vents sont moins fréquents et moins vifs que dans les environs. L'influence purifiante de la verdure qui règne au Vésinet et des forêts voisines se fait sentir de façon évidente.

Les eaux
Près de la seconde moitié de la plaquette est consacrée à l'examen de la qualité des eaux du Vésinet: le Docteur Maison y reproduit un article qu'il avait rédigé en septembre 1884 dans le "Journal de Médecine de Paris", la narration prend un ton nettement différent: la description est rigoureuse mais perd le charme naïf qui se dégage, pour le lecteur d'aujourd'hui, de la première partie. C'est un exposé didactique qui nous est présenté, sur lequel seuls des spécialistes pourraient porter un jugement autorisé. L'auteur passe en revue le milieu aquatique: les végétaux microscopiques, les herbes, les mollusques, les "gaz dissous dans l'eau", tous éléments concourant au classement des eaux en six types, qui vont de l'eau claire et potable à "certaines flaques d'eau à Gennevilliers, provenant des "égouts". Quant à elle, "la population du Vésinet boit une eau excellente, à peine chargée de sels de chaux", ce qui est "très favorable à la nutrition des enfants, et à la formation de leurs os en particulier". En terminant, le Docteur Maison affirme que les eaux de la Seine à Asnières sont "encore buvables" et que "le bétail les préfère aux eaux de sources".

La tentation est grande, avouons-le, d'ajouter un point d'exclamation. Tout cela était écrit en 1884-1885, Le Vésinet comptait alors quelque 3.800 habitants. En achevant la plaisante lecture de cette plaquette, on conserve la curieuse impression d'une "certaine idée" du Vésinet, paradis des "tousseurs de toute espèce". Heureusement, M. Fred Robida m'a précisé que le Docteur Maison, qu'il a connu autrefois, passait pour un original.

Alain-Marie FOY

    [§] Le Docteur Maison était le médecin attitré de l'Orphelinat St-Charles, médecin de l'Etat-Civil, et fut conseiller municipal.

     

Société d'Histoire du Vésinet, 2003 - http://www.histoire-vesinet.org