Echos du passé, Revue municipale, n°86, mars 1989

Les élections municipales de 1888

L'année 1875 avait vu l'élection du premier Maire de la nouvelle commune du Vésinet, Alphonse Pallu. A la suite de sa démission, en 1879, Jean Laurent lui avait succédé. Il devait se retirer au cours de son second mandat, en 1887. Aimé Foucault fut élu lors de la séance du Conseil municipal du 27 février 1887 par douze voix contre neuf pour Alphonse Ledru.
En 1888, eut lieu le renouvellement général des Conseils municipaux. Ces élections opposèrent les "républicains-radicaux", emmenés par Foucault aux "opportunistes [qui marchaient] la main dans la main avec les Orléanistes, les Bonapartistes et autres réactionnaires - ainsi que les qualifiait le journal l'Avenir de Saint-Germain - avec à leur tête Ledru".

La Liberté de Seine-et-Oise qui soutenait ce dernier, publia, au cours des jours qui précédèrent le scrutin, une galerie de portraits des candidats sous le titre "Les silhouettes municipales".
A tout seigneur, tout honneur, le premier croqué fut M. Foucault, Maire. "Avez-vous souvenir du temps où, dans votre enfance, on vous offrait une jolie boîte carrée, couverte d'un papier de couleur tendre ? Au moment où, le bec tout enfariné, vous souleviez le couvercle pour y prendre un bonbon, vous reculiez épouvanté par l'apparition d'une tête de diable. Chevelure hérissée, barbe hirsute, oeil flamboyant, le redoutable personnage se dressait subitement, mu par un ressort. C'est le portrait exact du citoyen Foucault, Maire du Vésinet. Longue tignasse rejetée en arrière, barbe noire et inculte, regard fixe, mouvements anguleux et mécaniques, rien n'y manque. Autant vous achèterez de diables en boîte, autant vous aurez de petits citoyens Foucault. "
L'article s'achevait sur cette proclamation: "Mais on en a assez de la dictature du petit Marat du Vésinet."
Les colistiers du Maire sortant n'étaient guère mieux traités. Monsieur Sarazin, premier adjoint, était décrit de la manière suivante: "Au Conseil municipal, il ne dit rien, ne sait rien et ne comprend rien. Second adjoint autrefois, il ne faisait rien et ne servait à rien. Premier adjoint aujourd'hui, il ne fait pas plus et ne sert pas davantage".
Face à la liste radicale, Alphonse Ledru était présenté comme: "Sec et nerveux, à l'abord froid et réservé. Mais cette froideur n'est qu'apparente et personne au Vésinet n'a eu recours à lui sans le trouver prêt à rendre service. Monsieur Ledru est avocat et plusieurs fois il a soutenu pour la commune des procès délicats; il l'a toujours fait avec une grande modération pour les personnalités en cause".
De M. Cappe, son second, on apprenait qu'il était un horticulteur distingué et fort instruit".
Le premier tour, le 6 mai, vit l'élection de six représentants de la liste du Maire et de sept de celle de conciliation, ainsi nommée par la Liberté. Au deuxième tour, la liste Ledru eut huit élus contre deux à la liste républicaine. Le Conseil municipal du 20 mai élit son nouveau Maire. Alphonse Ledru prit sa revanche en obtenant quinze voix contre sept pour Foucault. Ses premiers mots furent pour souhaiter, après cette rude campagne, que "les ardeurs de la lutte électorale [expirent] à la porte de la mairie".
Mais les semaines suivantes devaient montrer que les deux parties, notamment par l'intermédiaire des journaux l'Avenir et La Liberté de Seine-et-Oise, avaient gardé de nombreux motifs de désaccord en réserve.