D'après Jean-Paul Debeaupuis, Société d'Histoire du Vésinet (2022)

La famille Gastambide au Vésinet

Première génération : Adrien-Joseph Gastambide (1808-1880)

En 1875, lorsque les élections municipales extraordinaires furent organisées pour désigner le premier conseil municipal de notre commune, c'est Adrien-Joseph Gastambide qui obtint le score le plus élevé (257 voix), ce qui aurait dû lui valoir le fauteuil du maire.
Président en exercice de l'Union des Propriétaires du Vésinet, il demeurait au 8, route des Princes (rue François-Arago) et il avait fait partie du conseil municipal de Chatou au titre de la section du Vésinet. Mais en tant que Conseiller à la Cour de Cassation (fonction incompatible avec la charge de maire) il dut laisser celle-ci à Alphonse Pallu, arrivé deuxième avec 2 voix de moins.

Né à Paris le 15 avril 1808, fils d'industriel [1] Adrien-Joseph Gastambide fit une brillante carrière de magistrat entamée comme Substitut à Châlon, puis occupant la charge de Procureur du Roi à Nantes puis à Laon, comme Avocat général à Caen, Procureur général à Amiens puis à Toulouse, avant d'accéder à la Cour de Cassation à Paris.
Marié au Havre en 1843 avec Emilie Delaroche (1823-1894) il aura avec elle trois enfants : Eugène Emile né à Laon, Jules Adrien né à Caen et Cécile Elisa née à Amiens. Nommé en 1863 Conseiller à la Cour de Cassation, ce qui lui vaut la croix de Commandeur de la Légion d'Honneur [2], Adrien-Joseph installe sa famille à Paris et pour la belle saison, fait l'acquisition au Vésinet, aux débuts de la colonie, d'une propriété...

    ... sise à Chatou, canton de Saint-Germain-en-Laye, arrondissement de Versailles (Seine-et-Oise), route des Princes, à l'angle de cette route et de la route de la Plaine, connue autrefois sous la dénomination de route n°8, rive gauche, comprenant une maison d'habitation bâtie en pierres de taille et briques avec une terrasse sur sa façade, élevée sur caves d'un rez-de-chaussée et de deux étages, un chalet pour maison de jardinier et concierge, remise, jardin potager et jardin dessiné à l'anglaise, puits ; cette propriété, close par des murs et des grilles, est d'une contenance de sept mille six cent vingt-cinq mètres, vingt centièmes, formant la réunion des lots n°30, 31, 32 et 33 de l'îlot n°11, de la division générale du parc du Vésinet. [3]

La villa Gastambide de nos jours (1986)

2 route de la Plaine ou 8 avenue François-Arago

La famille Gastambide ne tardera pas à s'impliquer dans la vie de la colonie. Adrien-Joseph, le père, est élu au Conseil municipal de Chatou pour représenter l'importante section du Vésinet. Il sera désigné pour présider l'Union des propriétaires du Vésinet qui préparera l'érection en commune indépendante de la colonie. Il sera, on l'a vu, élu à son premier conseil municipal.
Emilie Gastambide et ses enfants s'engagent dans les œuvres de la paroisse protestante. Madame est du Comité de Dames qui se constitue en 1869 pour réorganiser le culte. Son fils Jules contribue à la création, vers 1880, d'une Société civile pour assurer l'exercice, dans le temple du Vésinet, du culte évangélique protestant...
Mais, le 14 mai 1880, à 72 ans, Adrien-Joseph Gastambide meurt subitement à son domicile parisien, 34 rue de Châteaudun (9e).

    ...Aujourd’hui ont eu lieu les obsèques de M. Gastambide, président de la chambre civile à la Cour de cassation, dont nous avons annoncé le décès avant-hier.

    Le cortège funèbre est parti du domicile du défunt, pour se rendre à l’église Notre-Dame-de-Lorette. Le deuil était conduit par ses deux fils : M. Eugène Gastambide, substitut du procureur de la République de la Seine, et M. Jules Gastambide et par son gendre, M. Chauvet.

    Une députation de la Cour de cassation, en robe, conduite par le premier président Mercier et M. le procureur général Tiertauld précédait la famille derrière le char funèbre. Elle était accompagnée d’une députation en robe des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation conduite par M. Bellaigue, son président. Une foule nombreuse suivait, composée de magistrats, d’avocats et de nombreux amis venus pour rendre au défunt les derniers devoirs.

    Après la cérémonie religieuse, le corps a été transporté au cimetière du Père Lachaise. M. Bavoux, ancien conseiller d’Etat et ami d’enfance du défunt, a prononcé quelques paroles qui ont vivement ému l'assistance. Il a rappelé les brillantes qualités du défunt, qui s’étaient révélées de bonne heure, dès les premières études, et qui n’ont cessé de l’accompagner jusqu’au poste d’honneur qu’il occupait en dernier lieu. [4]

Nommé conseiller à la Cour de cassation le 25 mars 1863, Adrien-Joseph Gastambide occupait depuis 1877 le fauteuil présidentiel à la chambre civile.
On lui doit la publication de plusieurs ouvrages estimés, parmi lesquels Traité des contrefaçons, ses Conseils aux jeunes avocats, et l’ouvrage intitulé Historique et théorie des droits de propriété des auteurs, et un grand nombre de dissertations. [5]
La Magistrature lui a aussi rendu hommage à travers une Notice sur la vie et les œuvres du président Gastambide sous la plume du Conseiller Justin Glandaz [6].

    Les pages que M. J. Glandaz a consacrées à la mémoire de son ancien et regretté collègue, M. le président Gastambide, retracent avec fidélité la figure de cet éminent magistrat, rappellent ses travaux comme avocat général à Caen, procureur général à Amiens, Toulouse, comme conseiller et enfin comme président de Chambre à la Cour de cassation. A l'intérêt qui s’attache à l’histoire d’un homme qui a honoré la magistrature par ses vertus, sa science et ses travaux, la brochure que nous venons de lire en joint un autre : elle réunit, en effet, sous forme d’annexe, des extraits de nombreux discours prononcés par M. Gastambide dans des circonstances diverses, et dans lesquels se reconnaissent la plume et l’esprit juridique de l’auteur du Traité de la contrefaçon et de l'Historique et théorie de la propriété des auteurs. [7]

A l'occasion de ses obsèques, le journal Le Gaulois rappela un épisode oublié de la vie de M. Gastambide. C'était au lendemain de la révolution de 1848. La cour de Caen procédait à l'installation de son nouveau procureur général, M. Bonnesœur, et M. Gastambide assistait à l'audience en qualité d'avocat général. Au cours de son discours, M. Bonnesœur s'étant livré aux attaques les plus violentes contre le roi Louis-Philippe, M. Gastambide, qui avait débuté dans la magistrature et y avait conquis tous ses grades sous le gouvernement déchu, quitta l'audience, ôta sa robe et signa immédiatement sa démission. Puis il se fit inscrire au barreau de Caen. Cette conduite si digne lui valut l'estime de tous, et les dossiers ne tardèrent pas à lui arriver en masse.
Mais bientôt « la République comprit que le départ d'un homme de la valeur de M. Gastambide était une grande perte pour la magistrature française, et peu après, elle le nommait procureur général à Amiens. Des traits de ce genre sont assez rares pour mériter d'être signalés. » [8]

Deuxième génération : Eugène Gastambide (1844-1913)

  • Cécile Elisa (1853-1934) la fille cadette, fut mariée en 1878 à un banquier genevois Marc Alphonse Chauvet (1852-1907), connaîtra un long veuvage de près de 30 ans.
  • Jules (1846-1944) quittera la région parisienne pour mener une carrière d'industriel aux Houillères et Fonderies de l'Aveyron d'abord, dont il fut fondé de pouvoir et administrateur, mais aussi maire de Decazeville (1888-1892) puis à la Société des avions et moteurs Antoinette [9]. Il sera à l'origine d'une entreprise qui jouera un rôle majeur dans le développement de l'aéronautique française.
  • Eugène (1844-1913), marié à Paris (8e) avec Marthe Adèle Odier en 1875, entreprendra une carrière de magistrat sur les traces de son père, profitant à la belle saison de la propriété du Vésinet.

Né le 16 mai 1844 à Laon dans l'Aisne, où son père occupait la fonction de Procureur du Roy près du Tribunal civil de première instance, Eugène Emile Gastambide poursuivait ses études de Droit à Paris, après avoir obtenu le Baccalauréat ès Lettres au Lycée de Toulouse, en 1861 (mention très bien), lorsque la famille put s'installer au Vésinet. En 1859, il avait été lauréat du Concours général en section Lettres.
Auditeur de 1ère classe au Conseil d'Etat, il optera pour la Magistrature. Affecté comme Substitut du Procureur Impérial à Chartres en 1868, puis Substitut du Procureur de la République à Versailles en 1873, il sera Substitut du Procureur de la République près le Tribunal de première instance de la Seine (Paris) en 1876.

Le 1er avril 1875, il épouse à Paris (8e) Marthe Adèle Odier [10] née en 1855 à Paris. Ils auront deux enfants : Valentine (1877-1962) et Maurice né à Versailles en 1876.
Il faut mentionner ici des faits qui seront rapportés beaucoup plus tard. Ils sont tirés d'une note publiée par l'Association des Avocats lors du décès d'Eugène Gastambide [11]

    ...Il avait d'abord été auditeur au Conseil d'État, puis il entra dans la magistrature. Son père, alors conseiller, allait devenir président de Chambre à la Cour de cassation.

    Substitut à Chartres, puis à Versailles, il venait d'être nommé à Paris, lorsque le 10 septembre 1877, il eut à requérir contre Gambetta. Le grand tribun avait prononcé à Lille la phrase célèbre: « Lorsque la France aura fait entendre sa voix souveraine, il faudra se soumettre ou se démettre. »

    Le Garde des sceaux du Cabinet présidé par le duc de Broglie releva dans ces mots un outrage au Maréchal-Président [Mac Mahon].

    Gastambide, qui n'avait pas recherché ce poste de combat, dut requérir ; Gambetta fut condamné par défaut ; la carrière du jeune substitut était brisée !

Gambetta « se donna la coquetterie de la générosité en refusant, après la victoire, de laisser sacrifier son ennemi. » Par son ordre, le substitut échappa aux diverses hécatombes des magistrats qui devaient se succéder depuis la chute de Mac Mahon. Mais le pauvre Gastambide moisit dans les oubliettes de la seconde Chambre civile, où se plaident les procès contre l'enregistrement et quelques mélancoliques liquidations et partages. Pendant huit ans et plus, il devait attendre vainement la robe rouge de substitut à la Cour : ses collègues plus jeunes « enjambaient par-dessus sa tête, ses cadets d'hier devenaient ses chefs d'aujourd'hui ». Il fini par se lasser et envoya sa démission, le 7 novembre 1886.

    ... Le Palais le regrettera comme un parfait gentleman et un consciencieux magistrat, poli, modéré, très affable, plutôt timide. On ne pouvait même l'accuser de cléricalisme, car il est protestant. [12]

    Son père, le président Gastambide, mort à la Cour de cassation, lui avait légué quelque chose de cette réserve et de cet effacement volontaire qui caractérisaient les hommes de droit pur, à une époque plus calme où les bouleversements de la politique ne venaient pas jeter les pacifiques dans l'arène, et où le contre-coup des réquisitoires retentissants n'arrêtait pas net, en pleine jeunesse, des hommes qui eussent honoré la carrière. [13]

Pendant vingt-six ans, Me Gastambide se consacra, pour occuper les loisirs que lui laissait la profession d'avocat, à l'enseignement primaire dans les écoles protestantes et à l'élaboration d'un ouvrage inachevé sur la contrefaçon en matière de propriété littéraire et artistique. [14] En choisissant en 1886 de s'inscrire au Barreau de Paris (avocat à la Cour d'appel) où il eut une activité discrète, Eugène n'eut pas à connaître la vie nomade de ses parents. Il profita aussi pleinement de la villa du Vésinet où il put voir grandir ses enfants tandis que son frère Jules était aux prises avec les mouvements de grèves dans les houillères de l'Aveyron et vivait à Decazeville un difficile mandat de maire.

Le 17 juillet 1913, Me Gastambide perdait la vie dans un accident de la circulation, percuté par un tramway électrique de la ligne du P.S.G.

    Chaque année, Me Gastambide, qui a soixante-huit ans et demeure à Paris, 4, rue de Logelbach, quittait son appartement aux premiers jours de juin pour passer l'été avec sa femme dans sa propriété du Vésinet. Cependant, Me Gastambide, presque journellement, se rendait au Palais. C'était un homme fort gai, vigoureux et très alerte. Malheureusement, il était affligé d'une surdité assez accentuée, une infirmité qui a contribué à causer sa perte.

    Au cours d'une promenade qu'il effectuait hier matin, l'avocat ne vit pas venir un tramway de la ligne Rueil-Le Pecq, que lui cachait d'ailleurs une ombrelle déployée contre le soleil. Il n'entendit pas davantage le bruit caractéristique du lourd véhicule. Tamponné, renversé, Me Gastambide eut le crâne fracturé. Il décédait une heure après, sans avoir repris connaissance, à la pharmacie du Rond-Point du Pecq, où on l'avait transporté.

    D'après l'interrogatoire des témoins de l'accident, aussitôt entendus par M. Van Langenhoven, le commissaire de police, il semble que la responsabilité du wattman, nommé Ménard, serait engagée jusqu'à un certain point. L'allure du tramway était telle qu'il était difficile au mécanicien de freiner assez rapidement pour éviter un obstacle. [15]

Parmi les nombreux articles de presse qui rendirent compte de ce tragique fait-divers, certains précisent que l'accident survint vers 11 heures du matin « non loin de la Mairie », ce qui cadre mal avec la localisation de la pharmacie où il fut transporté : la pharmacie du rond-point du Pecq (dont l'acte de décès en précise même l'adresse : 90 route de Montesson), où le décès fut constaté par le docteur Lousteau. Les dispositions pour porter secours aux blessés étaient alors extrêmement sommaires.[16]

Tramway du P.S.G en circulation en 1913.

 

Pharmacie du Rond-Point, 90 rte de Montesson

tenue alors par M. Léon Fresco, pharmacien (Collection shv).

Les obsèques de Me Gastambide furent célébrées le lundi 21 juillet, au temple du Saint-Esprit du 5 rue Roquépine à Paris (8e), l'avis tenant lieu de faire-part précisant « ni fleurs ni couronnes ». L'inhumation se fit au cimetière du Père Lachaise, dans le caveau familial déjà évoqué.

Troisième génération : Maurice Gastambide (1876-1914)

  • Maurice Édmond Adrien (1876-1914) né à Versailles (78) le 22 juillet 1876. Marié au Havre (76) en 1903 avec Marthe Gabrielle Kullmann. Ils auront quatre enfants.
  • Valentine Adrienne (1877-1962) née à Paris (8e) le 25 septembre 1877. Mariée le 11 juin 1907 à Paris (17e) avec Charles Arthur Alexandre Béguin (1869-1930) publiciste.

Né le 22 juillet 1876 à Versailles, alors préfecture de Seine-et-Oise, où son père débutait une carrière de magistrat qu'il avait toutes les raisons d'espérer prometteuse, le jeune Maurice a dû très tôt profiter des frondaisons du Vésinet. Il n'a sans doute gardé aucun souvenir de son séjour à Versailles puisque avant son premier anniversaire, sa famille s'installait à Paris où son père était affecté. Après des études secondaires au Lycée Condorcet, études brillantes si l'on en juge par les traces qu'ont laissé ici et là les prix qu'il a glanés, il choisit le Droit comme son père et son grand-père mais il s'oriente vers l'enseignement. Docteur en Droit en 1902 avec une thèse intitulée L'Enfant devant la Famille et l'Etat [17], il obtiendra l'Agrégation en 1912.
Sur les traces de son père, Maurice Gastambide ne cessera de donner, dans les universités populaires (Belleville) et des Mouvements protestants, des cours, des conférences, des causeries, sur des sujets littéraires plus que de droit.
En 1913 il achète une charge d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation. Il reste en outre professeur agrégé, chargé de conférences à la faculté de droit.

Le 17 mars 1903 au Havre (76) Maurice Gastambide a épousé une Lorraine originaire d'Epinal, Marthe Gabrielle Kullmann ; ils auront ensemble quatre enfants : Pierre (1904), Philippe (1905), Jean (1906) et Raymond (1910). Mais le 16 décembre 1910, moins d'une semaine après avoir mis au monde son quatrième fils, Marthe Gastambide meurt « des suites de couches » au domicile parisien du couple, 42 rue Beaujon (8e). Elle avait à peine 28 ans. Ses obsèques seront célébrées le 19 décembre au temple du Saint-Esprit, déjà cité.

Maurice Gastambide avait fait son service militaire après un sursis motivé par ses études. Incorporé comme fantassin en 1897 au 129e Régiment d'Infanterie, à Lisieux, il était caporal en 1898 et sergent en 1899. Il effectuera, au titre de la Réserve, des périodes en 1900 et 1906 et 1912. Le 1er octobre 1910, était versé dans l'Armée territoriale.
Lors de la mobilisation générale, le 3 août 1914, il rejoint à Bernay son régiment, le 18e RIT, en qualité de sergent. Il sera nommé sous-lieutenant à titre temporaire dans les jours suivants [18]. Les journaux de marche de ce Régiment ne sont accessibles qu'à partir de septembre 1915, aussi faut-il se reporter aux archives de la 82e Division d'Infanterie Territoriale à laquelle le 18e RIT était rattaché pour suivre son parcours. [19]
La Division est établie dans la 3e Région (Seine-Maritime, Eure, Calvados, Seine-et-Oise et Ouest de Paris). Du 17 au 19 août, les unités qui la constituent sont acheminées par voies ferrées dans la région d'Arras. Du 19 au 26 août, elles organisent une position fortifiée entre la Scarpe et la Lys, sur les canaux de la Haute Deule, de la Bassée et d’Aire. Le 24 août, elle subit une première attaque allemande et des combats sont engagés vers Tournai.
Du 26 août au 11 septembre, les unités font de nouveau mouvement par chemin de fer jusqu'aux environs d'Amiens. À partir du 30 août, elles se déplacent par étapes, par Poix, jusque derrière l'Andelle, vers Bourg-Beaudoin (stationnement, instruction et travaux). Du 11 au 26 septembre, nouveaux mouvements par Crèvecœur-le-Grand, Amiens et Albert, vers le nord-est d’Albert.
Le 26 septembre, la Division est enfin engagée dans ce que l'Histoire retiendra comme « la Bataille de Picardie » : Le 26, combats de Flers et de Longueval. Du 28 au 30, attaque sur Miraumont.
La troupe, composée de recrues à peine formées conduites par des officiers plein d'enthousiasme mais très inexpérimentés, va essuyer des pertes terribles. le sous-Lieutenant Gastambide est tué le 30 septembre, juste avant la stabilisation du front vers Puisieux-au-Mont où son décès sera déclaré (lieu-dit Beauregard à Puisieux, Pas-de-Calais).[20]

Sur la plaque commémorative inaugurée en 1920 dans les locaux du Conseil d'Etat, dans la salle des pas perdus, le nom de Maurice Gastambide figure avec 12 autres victimes de la Grande Guerre ; il figure aussi sur les deux monuments que la ville du Vésinet à consacré à ses concitoyens morts pour la France, au cimetière et dans la cour de la mairie. Il figure enfin sur la plaque consacrée de même par la communauté protestante, au temple.
Depuis 1914, le nom de Gastambide de figure plus dans les annuaires du Vésinet.

    C’est encore au barreau qu'appartenait Maurice Gastambide. Il était un des jeunes qui nous faisaient le plus d’honneur. Sa parole était élégante et sa science éprouvée, comme son cœur était généreux. Il avait passé brillamment ce redoutable concours de l’agrégation de droit ; puis, après de grands deuils qui avaient frappé son foyer, il avait acheté une charge d’avocat à la Cour de cassation. Ainsi armé, il y aurait montré un éclat incomparable.
    Il est tombé superbement, à la fin d’un violent combat, près d’Arras, au champ des braves. Nous nous associons avec émotion à la désolation de ses quatre orphelins.
    [21]

 

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    Notes et sources :

    [1] Le père d'Adrien-Joseph Gastambide (prénommé Claude Rosalie, ce qui lui a posé quelques problèmes) avait été fabricant de bronze. Il était encore à sa mort en 1852, président de la réunion des fabricants de bronze. Sur son dossier de chevalier de la légion d'honneur (1838) aux archives nationales la rubrique des prénoms n'est pas renseignée.

    [2] Il avait été nommé, en 1847, chevalier de la Légion d’Honneur ; en 1853, il était officier et en 1866, commandeur.

    [3] La Concorde de Seine et Oise, 6 décembre 1868 (Purges légales).

    [4] Le Droit, 19 mai 1880.

    [5] Dans ses premières années de magistrature, Adrien Gastambide a publié un ouvrage consacrés à la propriété artistique et aux contrefaçons. Ce Traité théorique et pratique des contrefaçons en tous genres (1837) découle de l'expérience paternelle, son père était fondeur et avait entrepris une étude des contrefaçons qu'il n'a jamais pu publier. L'histoire se répétant, ce sujet sera plus tard repris par Eugène Gastambide devenu avocat.

    [6] Notice sur la vie et les œuvres du Président Gastambide, par J. Glandaz, conseiller honoraire à la Cour de cassation. Paris : Marchal, Billard et Cie , éd. 1881

    [7] Journal du droit criminel : recueil périodique des décisions judiciaires et administratives concernant les matières criminelles, correctionnelles et de police, les douanes, les contributions indirectes, les délits forestiers, les frais de justice, et généralement tout ce qui constitue le grand et le petit criminel. Bureau du Journal de la jurisprudence criminelle (Paris) 1881.

    [8] Le Gaulois, 19 mai 1880.

    [9] La Société des avions et moteurs Antoinette fondée à Puteaux près de Paris en 1904, par Léon Levavasseur, Jules Gastambide et Louis Blériot tient son nom du prénom de la fille de Jules Gastambide (née en 1888). La Société est restée en activité jusqu’en 1912

    [10] Marthe Adèle Odier (1855-1917) est issue d'une famille de banquiers. Son père fut directeur de la Caisse d'Epargne de Paris, sa mère héritière de la Banque Barthélémy-Paccard, son grand-père régent de la Banque de France.

    [11] Bulletin annuel de l'Association amicale des secrétaires et anciens secrétaires de la Conférence des avocats à Paris - 1914 (n°36)

    [12] Mme Gastambide née Delaroche et ses enfants ont multiplié les marques d'attachement à la religion réformée et à la communauté protestante. Il en sera de même à la 3e génération. On peut se poser la question pour le cas d'Adrien-Joseph dont les obsèques ont été célébrées très officiellement en l'église Notre-Dame-de-Lorette selon le rite catholique.

    [13] Le Figaro, 6 novembre 1886.

    [14] Voir note 5.

    [15]Le Journal, 18 juillet 1913 (Un avocat parisien tué par un tramway).

    [16]Archives départementales des Yvelines, Etat civil,

    [17] La thèse ayant pour titre "L'enfant devant la famille et l'Etat" est soutenue à la faculté de Droit de Paris en avril 1902. Elle est sous-titrée Etude de législation comparée sur la valeur respective des systèmes de protection des mineurs, en droit français, italien et allemand. La thèse, jugée excellente, fera l'objet de nombreuses discussions et le texte sera publié aux Editions Arthur Rousseau (in-8°), XLVIII, 348p. Me Gastambide fera de ce thème du droit des enfants une spécialité (voir à ce sujet la tribune publiée par M. Gastambide dans Le Droit, Journal des Tribunaux du 17 avril 1908 au nom du Comité de défense des enfants traduits en justice intitulé "Tribunaux et conseils de tutelle pour inculpés mineurs").

    [18] Dossiers d'incorporations militaires, Archives départementales des Yvelines.

    [19] Les armées françaises dans la Grande guerre. Tome X. Les péripéties de la 82e DIT, une troupe de soutien, s'inscrivent à la marge d'un épisode plus important que fut la bataille de la Marne.

    [20] Le décès du s/Lt Gastambide, Maurice Edmond Adrien, du 18e Régiment d'Infanterie Territoriale (3e Bataillon, 10e Compagnie, Matricule 1728) a été enregistré à Bayencourt (Somme) le 12 octobre 1914, transcrit à Paris (dernier domicile connu du mort) le 13 mai 1915 puis retranscrit sur le registre du Vésinet le 30 mai 1915. Il n'était pas le premier. 17 de ses concitoyens étaient tombés avant lui. Il y en aurait beaucoup d'autres.

    [21] Le Droit, 31 janvier 1915.

 


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