D'après Figures contemporaines, volume 5, Lib. Henri Floury, Paris, 1900.

L'Œuvre de M. Xavier Alphonse Monchablon

Peintre d'Histoire très apprécié, M. Monchablon traite aussi avec un sentiment profond de composition et il n'est pas de toile de lui qui ne se signale à l'attention par la valeur du coloris ou le caractère du dessin.
Ceux qui ont pu admirer ses Quatre évangélistes au grand Séminaire d'Angers, ses Funérailles de Moïse au Musée d'Amiens, ou différents portraits des ses derniers salons ont pu estimer, comme elles le méritent, ses qualités d'observation, de finesse et de beauté simple. M. Monchablon, soit qu'il peigne un sujet historique, un sujet religieux, ou un sujet intime, s'entend admirablement à placer, au centre de son œuvre, la figure principale, et à grouper autour les seconds plans et les accessoires.
Lorsque le portrait par exemple est seul, l'artiste trouve encore le moyen de donner au visage tout le relief et toute l'importance. Un habile jeu de lumière et de clairs pour faire ressortir les traits caractéristiques. Déjà, en 1872, ayant à apprécier le portrait du frère de l'auteur, en uniforme de garde national, M. Jules Clarétie écrivait qu'il le trouvait "superbe, très vivant", et il ajoutait " je dirais agissant, car il fait le coup de feu !"
L'année suivante, le même éminent écrivain, appréciant le portrait que M. Monchablon expose, dit encore "Monsieur Buffet père, solide encore, maigre et tanné en quelque sorte par l'âge, lit son journal. Visage énergique, rigide, tourmenté. M. Monchablon a fait un portrait excellent."
Dans les peintures de fresques, l'artiste élargit ses mêmes qualités,leur donne l'envergure que comporte le sujet historique ou biblique. Entre toutes, M. préfère les scènes qui offrent une beauté puissante ou inspirée : Cléopâtre venant à Tarse se justifier près d'Antoine, Vénus se rendant à Cythère, Jeanne d'Arc, la Toilette de Vénus.
Les physionomies si diverses qui respirent tour à tour la volupté antique ou la passion chrétienne, s'animent sous son pinceau d'une vie intense et lumineuse. Les visages resplendissent, les traits s'affinent, le décor environnant prend de la splendeur, grandit jusqu'à sembler de la composition d'un vieux maître de l'école de Venise : Tiepolo ou Véronèse !
Mais où M. Monchablon excelle, c'est à rendre les figures rudes et puissantes, inspirées et nobles des apôtres, des prophètes et des évangélistes. Saint Marc, saint Luc, saint Mathieu, saint Jean, les saints de la Lorraine, le Joseph de la Sainte Famille sont ses sujets de prédilection. Personne ne sait, comme lui, donner à ces œuvres d'une grande beauté sévère, la flamme qui peut seule les animer d'un air surnaturel, divin même ! Son Moïse surtout se signale par ces qualités et par d'autres plus complètes encore : une énergie plus forte du dessin, une virilité plus grande dans la manière de peindre, nécessaires à l'interprétation d'un sujet aussi élevé que celui-là. L'artiste, en plusieurs fois, s'est plu à retracer cette vie mystérieuse et grande. Il composa d'abord l'Éducation de Moïse, puis, plus tard, les Funérailles de Moïse, aujourd'hui au Musée d'Amiens, et qui représente une de ses œuvres les plus complètement belles. Il se dégage de cette toile capitale une sorte de terrible magnificence et l'on devine que le maître, avant de l'achever, se pénétra intimement des textes sacrés qui l'inspirèrent. Avec cela la majesté des attitudes, la beauté des draperies, la finesse des nuances, le rythme des gestes concourent à donner aux figures une admirable grandeur.
"Cette dernière œuvre, écrivit le savant et regretté Charles Blanc, est un bel exemple du sens esthétique des lignes." Une pareille louange, venant d'un tel homme, est précieuse.

Louis Joseph Buffet (1818-98)
Président de l'Assemblée Nationale de 1872 à 1875.

par Alphonse Monchablon, 1877.
Huile sur toile, Château de Versailles, France.
[Don de la famille Buffet]

La carrière de M. Monchablon est une des plus importantes du monde artistique moderne. De nombreuses années se sont écoulées depuis le jour où il lui fut donné de tenir un crayon. M. Monchablon était, encore un enfant à cette date ; il travaillait encore à l'école de son père, un modeste instituteur des Vosges, et grâce à un sens précoce de l'observation, des contours et des reliefs, il s'initiait déjà, si petit, à la grande beauté de l'art !
Depuis, les œuvres ont succédé aux œuvres. L'artiste, à presque tous les salons, se fit remarquer des critiques. Le public l'encouragea de ses suffrages. L'Etat lui confia d'importants travaux ; il eut à traiter, pour divers monuments, d'amples et somptueux sujets de décoration. Et son pinceau, actif et fort, ne laissa personne dans l'attente. Aujourd'hui encore, bien que l'âge soit venu et que l'artiste aurait droit à un peu de loisir bien gagné, il ne désarme pas et continue à peindre. L'une des compositions, qui lui aura demandé le plus de soins le Triomphe du Christ sur le paganisme occupe ses instants.
Les œuvres de M. Monchablon, dispersées dans la plupart des musées ou des monuments de France, affirment sa prodigieuse activité, son inspiration continue, la diversité de ses sujets, la force et la maîtrise de son pinceau.

Xavier Alphonse MonchablonŒuvres principales

  • Véturie aux pieds de Coriolan (1862)
  • Joseph se faisant reconnaître par ses frères (1863)
  • La Fête d'Amphitrite (1864) villa Médicis, Rome
  • Le Châtiment (1866),
  • Cléopâtre venant à Tarse se justifier près d'Antoine (1866)
  • L'Education de Moïse (1866)
  • Figure d'après nature et figure d'après l'antique (1866)
  • Les Funérailles de Moïse (1868) Musée d'Amiens
  • Jeune fille et vieille femme (1869)
  • Portrait de Mme Pape-Carpentier (1870)
  • Vénus se rendant à Cythère (1870)
  • Le frère de l'auteur (1872) en uniforme de garde national
  • Le Christ législateur (1872)
  • Portrait de M. Buffet père (1873)
  • Ananias frappé à Mort (1873) Musée du Luxembourg
  • Les Quatre Évangélistes (1874) pour le grand séminaire d'Angers
  • Salvator mundi (1875)
  • Portrait de M. Monchablon père (1875)
  • Les Saints de la Vosge (1876) Musée du Verre, du Bois et du Fer d'Hennezel-Clairey.
  • Scène du procès de Jeanne d'Arc (1876)
  • La Toilette de Vénus (1877)
  • M. Louis Joseph Buffet, sénateur (1877)
  • La Sainte Famille (1878) pour l'église Notre-Dame-des-Champs (Exposition universelle de 1878)
  • Un Titan déchu (1878)
  • Victor Hugo à Jersey (1880) Musée d'Épinal
  • Les Lettres, les Arts et les Sciences dans l'Antiquité (1880)
  • Portrait de M. Bougueret (1882) Musée des Beaux-Arts, Beaune
  • L'Annonciation et l'Assomption (1882) à l'église de Ménilmontant
  • Les Enfants illustres de la Lorraine (1884) Palais des Facultés de Nancy
  • M. Savorgnan de Brazza, (1886) portrait
  • Retour de chasse au temps des Guise (1887)
  • Le Vice-amiral baron Roussin (1888) portrait
  • M. Méline, ancien président de la Chambre des Députés (1889) portrait
  • Dans l'Est (1890)
  • Venite ad me omnes (1894)
  • Henri IV et Gabrielle d'Estrées (1895)
  • Vision (1896)
  • Mars-la-Tour, le 16 août 1895 (1896)
  • Napoléon à Sainte-Hélène (1896)
  • L'Armée rendant hommage aux tombes des soldats (1897) pour la basilique de Domrémy
  • Bonaparte en Egypte (1901)
  • Le Retour de l'enfant prodigue (1903)

…et de nombreux autres portraits : de la famille du baron de Ravinel ; de Domange ; de l'amiral Véron, sénateur ; de M. Ernest Hiolle ; du général Thomas ; du général Pourcet ; de Liane de Pougy ; du RP François Balme ; de François-Théodore Legras ; etc...

 

    Autres Sources :

    - Dictionnaire national des contemporains, T. 5 sous la dir. de C.-E. Curinier, Office général d'éd. de librairie et d'impr. (Paris) 1899-1919.

    - Bulletin des sociétés artistiques de l'Est, nov 1903 et févr 1907.

    - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle, par Pierre Larousse, (supplément II), 1896.


Société d'Histoire du Vésinet, 2011- www.histoire-vesinet.org