Texte anonyme de la fin du XIXe siècle

Childebert III donne aux moines le Territoire d'Aupec
dont dépend la forêt du Vésinet

[...] Et comme si toute religion avait besoin de ténèbres et de mystères pour fleurir, nous voyons alors ce bizarre changement des bois sacrés du druidisme en forêts saintes du christianisme. Et, en effet, dès la fin de la race des rois mérovingiens, l'histoire nous apprend que Childéric II et Thierry III avaient déjà un logis royal à l'abbaye d'Aupec et un oratoire dans la forêt de Laye.
Or, cet Aupec, Alpicum des anciens, d'Alp, haute montagne, c'est Le Pecq moderne, dont on a inconsciemment détruit le véritable nom et altéré le sens étymologique.

Childebert III
comme on se le représente au XVIIIe siècle

Alpicum, c'est le patron, le tuteur de la forêt du Vésinet. Pendant de longs siècles, leur histoire va être intimement liée. La forêt du Vésinet, tributaire d'Aupec, en suivra la fortune et y laissera même pour toujours détachée une de ses parties. C'est la date de 668 qui, la première, apparaît exactement dans l'Histoire en parlant d'Aupec, sous Childéric II. En effet, à cette époque, ce roi vient se retirer à Aupec, sans doute pour fuir ses leudes infidèles, comme, plus tard, les rois des autres races trouveront sur l'Alp un abri contre les seigneurs féodaux.
L'éclosion d'une nouvelle religion avait fait naître les moines et les abbayes pour qui, dès cette époque déjà, les biens de ce monde n'étaient pas des biens méprisables. Cette nouvelle caste se jeta vite à la tête des chefs francs faits chrétiens par la conversion de Clovis, et peu de temps suffit pour qu'ils s'emparassent des esprits de ces guerriers encore abruptes.
Maîtres de l'esprit, les moineries devinrent bientôt maîtres des corps et dominateurs des actions des chefs d'État. Et, spéculant sur leurs vices comme sur leur faiblesse, ils obtinrent d'eux tout ce qu'ils voulaient : le pouvoir, les richesses.

L'enfant Childebert III, aussi faible que timoré, est le premier qui, par cas de conscience sans doute, crut devoir disposer des terres qui nous occupent. En effet, en 704, et d'après les chroniques de l'abbaye de Saint-Wandrille, le roi Childebert III donne aux moines la terre d'Aupec et tout ce qui en dépend. Une charte de l'an 1000 rappelle cette donation et la spécifie par ces mots : Novitianus, Curbavia, Albacha, Bannida,Tremlido, cum illis forestariis quinque, toutes ces terres dépendant du territoire d'Aupec.
Cette donation, rapprochée d'actes postérieurs confirmatifs et plus spécialement indicatifs des lieux, et que nous retrouverons plus tard, nous indique facilement que, parmi ces bois, se trouvait celui du Vésinet, quoique innommé dans la Charte de 704.

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    Note SHV :

    Pour les historiens modernes, il existe beaucoup d'incertitudes et de légendes contradictoires quant à l'Histoire du roi Childebert III. Il s'accordent cependant sur l'année de sa mort : 662 (18 octobre) donc bien avant la date de la charte sus-mentionnée. On ne connaît d'ailleurs cette charte qu'indirectement, par des documents postérieurs qui s'y réfèrent. C'est la raison pour laquelle on a soupçonné que certains de ces documents soient des faux. Pratique courante à l'époque que de se référer à des documents anciens, oubliés ou perdus, pour renouveler des donations parfois imaginaires ! D'autre part, de nombreux écrits datant du Haut Moyen Age, s'apparentant à des « romans historiques » ont été longtemps traités par les historiens comme des chroniques.


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